Chacun sait qu’on peut estimer l’âge d’un arbre en comptant les cernes de croissance du bois. Mais il est possible d’aller plus loin parce que l’impact du climat sur la croissance d’une espèce donnée se traduit par des cernes plus ou moins larges lors des années humides et des cernes plus ou moins minces en années sèches. L’alternance des années humides et sèches varie avec la région et avec l’époque de sorte que pour un type donné de climat (continental, océanique, nordique,…) et sur des périodes suffisamment longues, les séquences de cernes épais ou minces sont uniques.
CONTENU GAUCHE | d
Cette variation est aléatoire et il est nécessaire de redéterminer aujourd’hui et de proche en proche la succession dans le passé des séquences d’années sèches et humides. C’est ce qui a été réalisé pour certaines espèces : pinus aristata des déserts de Californie (jusqu’à 7000 av. J.C.), quercus pour l’Irlande (sur 9000 ans), l’Allemagne de l’ouest (sur 6000 ans), l’ouest de la Suisse (sur 4500 ans), l’est de la France (sur 3000 ans), etc… Mais on estime que pour couvrir la variété des climats de la France, il faudrait construire cinq courbes dde référence. Les laboratoires spécialisés recherchent pour cela des bois anciens (bois fossiles, poutres d’édifices anciens, membrures d’épaves, encadrements d’époque de tableaux anciens, stations lacustres, etc…). La difficulté est de retrouver des bois présentant des séquences suffisamment longues(nombre de cernes > 50) et des zones de recouvrement d’un bois à un autre aussi longue que possible. On a pu alors avec quelque certitude reconstruire de proche en proche des séquences très longues (voir plus haut).Sur un échantillon prélevé par tronçonnage ou carottage dans le bois et après préparation ad-hoc de celui-ci, on peut lire sous binoculaire et sur un banc équipé d’une vis micrométrique l’épaisseur des cernes successifs. Les systèmes modernes de pointage sont couplés avec des ordinateurs et la saisie des données est ainsi assurée. Pour caractériser les variations d’épaisseur des cernes d’une séquence, les dendrochronologues ont introduit la notion de sensitivity S ou fluctuation moyenne. C’est le quotient entre la somme des différences d’une année à la suivante et la somme des largeurs des anneaux annuels (multiplié par 100 pour une valeur donnée en %). Cette grandeur varie avec les espèces (18% pour le chêne ou le sapin, mais 31% pour le hêtre).A partir de toutes les séquences individuelles couvrant une même période, on établit alors une séquence moyenne valable pour l’espèce, le type de climat et la période considérée. Pour quantifier les concordances entre séquences individuelles, on introduit alors le rapport R=Sm/Sj, quotient entre les fluctuations moyennes Sm de la séquence moyenne et celles Sj de la séquence individuelle. Des valeurs de R supérieures à 50% sont acceptables.Finalement, en ajoutant bout à bout les séquences individuelles de périodes ayant des zones de recouvrement aussi longues que possible, on réalise la séquence longue de référence. Mais il existe par la force des choses des séquences dites flottantes dont les extrémités n’ont pu être raccrochées aux séquences voisines (par exemple pour quercus en Allemagne du sud). Pour effectuer la datation d’un bois archéologique, il suffit de positionner la séquence individuelle obtenue sur la séquence longue standard dressée pour la même espèce et le même type de climat. Cette recherche et le calcul du rapport R correspondant sont informatisés. La date peut être annoncée à l’année près si on dispose sans ambiguïté du dernier cerne de croissance (les spécialistes détectent même alors la saison d’abattage de l’arbre). Sinon, il demeure une incertitude. Mais les scientifiques préfèrent rester prudents car il existe des accidents de croissance (par parasitage ou intervention trop drastique lors de taille pour certaines espèces).
|