Dans les sociétés autres qu’industrielles, la diversité des métiers est assez faible et le coût des transports diminuent la présence de matériaux d’importations. Les ressources du territoire sont donc à considérer dans bien des cas comme exclusives sur le plan alimentaire. L’aspect qui intéresse ici l’archéologue est l’exploitation en elle-même de ces ressources.
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dEvaluation des conditions d’exploitation des ressourcesL’exploitation des ressources alimentaires dépend de nombreux paramètres, dont : • La collecte des informations La constitution d’une base de données est essentielle ici. Le système d’exploitation des ressources alimentaires va dépendre des ressources disponibles qui sont évaluables à partir des études du paléoclimat à une époque donnée. La stratégie de l’exploitation peut ensuite être connue par la découverte de vestiges archéologiques caractéristiques (silos, restes de repas…). Une évaluation des apports caloriques peut venir infirmer ou confirmer un modèle. Peu à peu, par ajustement, une théorie inductive ou hypothético-déductive peut être bâtie. Parmi les données nécessaires, citons également la durée d’occupation du site, sa saisonnalité, la datation de chaque structure liée à l’exploitation alimentaire, la cartographie de l’habitat, de ses structures, de sa position par rapport aux zones de ressources exploitables, ainsi que les vestiges alimentaires (quantification en terme de Nombre Minimum d’Individus -NMI-, étude des pratiques de collecte et de préparation, étude archéozoologique complète pour les animaux ou ethnobotaniques pour les végétaux) et les vestiges matériels (techniques de prédation, origine du matériel utilisé, reconstitution de la chaîne opératoire de collecte, études des pratiques culinaires à partir des céramiques ou des structures de stockage…). • Les modèles La constitution des modèles répond à une logique précise : identification des principes d’exploitation à partir de comparaisons éthnologiques, de l’état paléoenvironnemental et des données géographiques. L’ensemble est modélisé à l’aide d’un SIG et d’estimations statistiques. • La localisation de l’agriculture Le principe pratique et ethnologique souvent observé consiste à rapprocher le plus possible le site cultivé de l’habitat, notamment lorsque la main d’oeuvre est nombreuse. L’espace cultivable est donc en général réfléchi et organisé. L’apport de l’étude du paléoenvironnement détaillé associé à des modèles statistiques géographiques réalisés sur un système d’information géographique (qui prend en compte la position de l’habitat, des structures, des points d’eau, du relief et des voies de communication) permet de localiser ces zones, mêmes si presque toutes les traces ont aujourd’hui disparu. • Les chasseurs cueilleurs L’étude doit dans un premier temps évaluer les ressources alimentaires mensuelles en fonction du climat, localiser les habitats et utiliser les données géographiques et paléoenvironnementales. L’exploitation du potentiel alimentaire est supposée répondre à des principes obtenus par comparaisons ethnologiques : l’exploitation doit être sûre, et la ressource doit être accessible. Le choix de la ressource va dépendre de son propre poids, de son apport énergétique, de sa difficulté de récupération, de la possibilité de conservation ou de stockage, de la proximité d’abris, de la distance à parcourir, du réemploi possible de la matière non consommée (os, tendons…), ainsi que sa densité ou sa concentration au sein de son groupe. • La diffusion spatiale des vestiges matériels Le terme de diffusion tend à se substituer à ceux de commerce ou d’échange. Il a l’avantage de ne pas segmenter inutilement les phénomènes notamment en séparant production et commercialisation. Les études et modélisations dans ce domaine tentent de reconstituer les pratiques et les systèmes d’échanges et de production passés, puis de tenter de comprendre l’organisation socio-économiques et ses interactions avec le domaine socio-culturel. dddFormalisation de la problématique• Le système de production Dans un premier temps, l’étude doit se tourner vers la connaissance des systèmes de production. Ceux ci se décomposent en général en systèmes d’extraction (récupération de la matière première à son état naturel), de transformation (destinée plus tard à la production), de production (en produits manufacturés) et de récupération (réemploi notamment). Ces systèmes doivent être connus en terme de localisation géographique, de produits, de méthodes de production, de valeur relationnelle entre les groupes humains concernés et en terme d’impact et d’organisation socio-culturels. La statistique permet de réaliser des cartes positionnant les centres de production, de gérer l’échantillonnage spatial des découvertes (plus complet que le report des découvertes fortuites) et de définir des estimateurs d’intensité de la diffusion spatiale (fonction en général de la distance au centre de production, dans des directions préférentielles). • Le système de diffusion La diffusion concerne l’ensemble des déplacements de l’objet considéré depuis son site d’extraction, de transformation ou de production, selon la problématique envisagée. Dans certains cas, c’est l’objet qui se déplace seul ; dans d’autres cas, plus rares, il suit les populations auxquels il est attaché. Le phénomène de diffusion peut être caractérisé plus avant en étudiant le rôle de l’intermédiaire commercial potentiel, la localisation de l’échange, le mode de paiement ou d’échange… Ces études ne sont malheureusement souvent accessibles que par des hypothèses construites à partir de comparaisons ethnologiques ou dans les meilleurs cas, de témoignages écrits historiques. L’origine des objets peut être définie de façon univoque par analyse chimique ou physique de ses composants : citons notamment l’analyse par rayons X, la pétrographie, la spectroscopie infra-rouge ou de masse, la thermoluminescence, la spectroscopie d’émission, l’absorption atomique ou la composition physico-chimique… • La diffusion spatiale : conception d’un modèle Quelques facteurs sont à estimer pour mener à bien cette étude. D’une part il faut pouvoir avoir accès à un échantillonnage spatial (mesure de densité notamment) des artefacts. Puis il faut avoir accès à des données de distance (distance à partir des routes commerciales et non à vol d’oiseau, impact des obstacles naturels et du relief…) et de direction de diffusion (dont de durée) qui caractérise l’anisotropie de l’espace et donc par conséquent de la diffusion. Il est alors possible de définir un estimateur de diffusabilité, donnée vectorielle constituée d’une direction et d’une intensité. L’ensemble peut être reporté sur une carte matérialisant les intensités de diffusion, ou en présentant des courbes d’isodensités (courbe de niveau de l’intensité de la diffusion). En étude complémentaire, il est possible d’établir un diagramme de décroissance de diffusion en fonction de la distance (dans une direction donnée pour plus de cohérence) et développer un modèle de gravité qui étudie, à partir d’un modèle de décroissance, l’effet de la concurrence de deux centres producteurs. La modélisation emprunte les lois de la gravité en conservant la notion de distance aux masses mais en substituant la masse par le volume de production par exemple, ou la taille de chacun des sites (plus artificiel). Il est alors possible de construire un modèle mathématique de quantification par interpolation et de le tester au fur et à mesure des nouvelles découvertes. Notons qu’il existe des modèles de diffusion en milieu isotropique de produits manufacturés de catégories différentes: produits de luxe, produits domestiques échangés de proche en proche, modèles de redistribution, modèles de commercialisation…
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