La photogrammétrie est un moyen d’obtenir des informations sur la forme et les dimensions d’un objet à partir d’une photographie (information en deux dimensions) ou d’un couple de photographies (informations en trois dimensions) et de points de référencement.
L’objet de la photogrammétrie est donc permettre de “mesurer” directement sur le support photographique ou l’image informatique (et donc de dessiner) des objets géométriques à l’échelle.
La restitution (nom technique des opérations de mesure) peut être réalisée à partir d’une image unique redressée par une opération mathématique (appelée orthophoto) ou à partir d’un couple de photographies, qui après une mise en géométrie à l’aide d’appareillages optiques ou numériques, permet une vue stéréoscopique du sujet photographié (donc en trois dimensions).
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eUne technique apparue au XIXe siècleLe premier relevé photogrammétrique a eu lieu en 1849 ; mis au point par un jeune militaire du génie, le capitaine Aimé Laussedat, ce principe lui permit d’effectuer le premier relevé de la façade de l’Hôtel des Invalides. La photogrammétrie (mot inventé par l’architecte allemand Albrecht Meydenbauer) a aujourd’hui des applications principalement tournées vers la cartographie. La photogrammétrie architecturale a connu des années fastes ces dernières décennies, notamment par l’action conjointe du Ministère de la Culture, du Centre de Recherches des Monuments Historiques, de l’atelier de photogrammétrie de l’inventaire Général et de l’Institut Géographique National notamment qui a collaboré à divers projets aussi bien en France qu’à l’étranger (citons les célèbres relevés des Temples de Nubie à Assouan, au profit de l’UNESCO). • La méthode D’une façon simple, la méthode s’inspire directement de la vision humaine : nos deux yeux voient le même sujet sous un « angle différent », c’est à dire avec un décalage latéral de quelques centimètres. La parallaxe introduite par les deux images permet au cerveau de reconstituer la troisième dimension, ce que nous voyons de la réalité… • Mise en pratique succincte La réalisation d’un relevé photogrammétrique s’effectue en deux étapes : – tout d’abord la prise de vue, à partir d’un avion pour la cartographie ou terrestre pour les relevés d’architecture accompagnés de la mesure topographique de points de références (repérés sur les photos par des ciblettes ou des objets reconnaissables) ; – puis viennent le traitement à proprement parler et la restitution. • Les traitements mathématiques nécessaires Essayons de comprendre plus en détail comment passer d’une photo à une orthophoto… Lors de la prise de la photo (ou des photos), la position de l’appareil est inconnue et influe sur la forme de l’image obtenue. Il existe par conséquent de petites variations de position qui font que l’image n’est pas superposable à l’objet en trois dimensions projeté sur un plan. Pour passer de l’image à l’objet, il faut appliquer une « similitude » c’est à dire une transformation mathématique de l’espace qui combine une rotation dans l’espace, une translation et une mise à l’échelle appelée homothétie. La réalisation de cette transformation permet d’obtenir une photo redressée ou orthophoto. Essayons maintenant de comprendre comment passer d’un couple de photos à un modèle en trois dimensions. Nous voyons rapidement que nous ne pouvons effectuer des mesures de la dimension Z à partir de l’orthophoto précédente (l’image est plate, en 2D, la réalité est en volume). Ceci s’explique par la non bijectivité de la transformation objet-photographie (c’est à dire que tous les points de l’objet n’apparaissent pas sur la photo) ; l’ajout d’une deuxième photographie, prise sous un “autre angle” (comme pour les yeux !), permet de rajouter des équations et de rétablir la bijectivité (uniquement des points présents sur les deux photos du couple, bien sûr, sinon on retombe dans le cas de la photo unique). La deuxième photo doit donc être prise sous un « angle » différent : en général, elle correspond à un déplacement du photographe et de l’appareil par translation d’une enjambée à droite ou à gauche. Notons que la construction du modèle à partir de deux photos est très complexe mathématiquement. Pour simplifier la résolution, on utilise des linéarisations d’équations, qui ne sont valables que dans certains cas. Il faut notamment s’assurer que le plan entre l’appareil et le plan du sujet sont quasiment parallèles (et que donc, les angles de la rotation à appliquer sont « petits »). Les photos sont donc toujours prises en tentant de se placer le plus parallèle possible au sujet… • Les limitations des systèmes optiques Malgré son utilité et sa performance prouvée, la photogrammétrie optique (à base d’appareillage optique) voit son développement freiné par deux principaux obstacles : – le prix exorbitant des investissements (outils optiques spécifiques), destinés à un public spécialisé qui ne deviennent rentables que par une production de masses (du type des travaux cartographiques de l’IGN) – la spécialisation nécessaire des opérateurs. • Une solution : les logiciels spécifiques Une des idées actuelles est de démocratiser cette technique et de la rendre accessible plus facilement, en utilisant les évolutions technologiques informatiques. Parmi les principaux objectifs visés, il faut permettre à l’utilisateur d’obtenir de façon rapide et simple les données de base (photographies numériques et points de référencement), de posséder des outils informatiques de traitement des données facilement adaptables offrant la plus grande compatibilité possible (type PC de bureau fonctionnant sous Windows…), et cela à prix abordables. • Equipement et données de base Les photos. Leurs origines peuvent être diverses : photos argentiques scannées, photos numériques ou photos fournies par l’IGN… Les logiciels. Dans un deuxième temps, il s’agit de s’équiper d’un système informatique de photogrammétrie. Tous les systèmes actuels n’offrent pas les mêmes performances et surtout ne sont pas accessibles aux mêmes prix !
Le traitement informatique du modèle• Mise en place du modèle En général, quelque soit le logiciel, la méthodologie est la même : – les apparier, c’est à dire les faire coïncider soit de façon manuelle (d’où l’intérêt des lunettes qui permet une mise en place de qualité) soit par corrélation numérique (recherche des ressemblances des photos de façon automatique) mais qui accusent certaines erreurs (rappelons que les points de vue des deux photos sont différents, d’où des changements de couleur, d’ombre et de lumière…) ; – les informer, en fournissant au système les coordonnées « terrain ». Lorsque ces derniers sont connus en position relative, le modèle obtenu sera aussi en coordonnées relatives. Si les points sont rattachés à un référentiel (une borne IGN par exemple), on obtient alors des coordonnées absolues dans le référentiel choisi. • Le relevé photogrammétrique informatisé Lorsque ce nombre de points de référencement est suffisant (4 en x, y, z au minimum en général), le logiciel effectue un calcul de construction de modèle. Le modèle est alors obtenu en trois dimensions. Il est alors possible de se déplacer dans le modèle virtuel en obtenant en permanence le lien coordonnées images – coordonnées terrain. Ainsi, tout point mesuré dans le cliché peut être connu en coordonnées réelles du terrain…sans l’avoir mesuré sur le terrain ! Il ne reste plus qu’à l’opérateur à dessiner par l’outil graphique fourni directement dans le modèle pour obtenir des listes de points et d’objets en trois dimensions. Les données sont obtenues sous formes d’un fichier de points associés à leurs coordonnées photos et terrain. • Le traitement du fichier de points Le fichier de points est récupérable de façon brut par exportation dans un quelconque logiciel 3D (Dessin assisté par Ordinateur) ou dans un Système d’Information Géographique. Une des applications possibles est l’exploitation d’un Modèle Numérique de Terrain (MNT). C’est le cas classique de la cartographie et de la microtopographie. Il est aussi possible de construire un modèle VRML (réalité virtuelle), outil de médiatisation et de communication incontournable (langage de réalité virtuelle dont les modèles sont visualisables et manipulables sur internet notamment). Cette technique peut être utilisée pour faciliter la visualisation d’une gravure rupestre faisant corps avec le relief de la paroi, d’un relevé architectural de façade ou d’un bâtiment complet (par association de plusieurs couples faisant le tour de l’édifice) ou d’un objet archéologique spécifique (poteries, meubles…) par exemple.
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