La stratigraphie a pour but d’établir des enchaînements chronologiques à valeur régionale à partir de positionnements relatifs de séquences. Son importance est fondamentale en archéologie et constitue globalement le principe numéro un de la fouille.
Les principes de la stratigraphie en archéologie sont empruntés à la géologie, qui très tôt a permis de mettre en relation les positionnements spatiaux de couches et leurs relations temporelles. L’étude des strates, de leur succession, de leur contenu, permet de les réorganiser en séquences chronologiques.
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La datation des cultures par leurs objets matériels (inspirée de la géologie, qui date les strates par ses fossiles directeurs) a permis de construire peu à peu une périodisation et de construire une chronologie relative (par la stratigraphie). La datation absolue est maintenant possible par les méthodes physico-chimiques (carbone 14, thermoluminescence…). Les principes de la stratigraphieLa stratigraphie s’appuie sur sept principes issus en partie de la géologie et des sciences de la Terre, réadaptés à l’échelle de temps et à l’action anthropique : 1. Principe de l’horizontalité originelle : toute couche naturellement déposée dans une forme non contenue tendra vers une disposition horizontale. 2. Principe de la stratigraphie latérale : c’est le cas des accolements de strates, qui selon leur connexion physique peuvent entretenir ou non une relation temporelle. 3. Principe de continuité : une couche parfaitement définie (en terme de limites physiques et de faciès) a même âge en tout point. 4. Principe de positionnement stratigraphique : une strate possède une position stratigraphique entre la strate supérieure et la strate inférieure, qui se matérialise par un contact physique. 5. Principe des fossiles directeurs : deux couches aux mêmes fossiles directeurs sont du même âge. Les fossiles directeurs choisis doivent avoir une durée d’émission très courte pour être caractéristiques. 6. Principe de périodisation : la couche est datée d’un moment consécutif à celui de la fabrication de l’objet le plus récent découvert, d’un moment consécutif à celui de la fabrication de l’objet le plus récent découvert dans la couche inférieure (avec contact physique), et à un moment antérieur de la fabrication de l’objet le plus ancien qui est découvert dans la couche supérieure (avec contact physique). 7. Principe de la stratigraphie horizontale (topochronologie) qui désigne le cas d’une succession d’ordre topographique (déplacement temporel et géographique lié).
Conséquence : les types de fouillesLa fouille stratigraphique. La fouille stratigraphique consiste à fouiller le site carré par carré, de façon diachronique, en notant minutieusement toutes les données. L’interprétation n’est possible qu’à la fin de la fouille à partir des plans de synthèse. Elle est très utilisée en Préhistoire notamment. La fouille extensive ou “open area”. Elle consiste à fouiller par strates sur l’étendue d’une unité fonctionnelle (un îlot, un quartier, un secteur), de façon synchronique. Le choix de la technique dépend notamment du type de site et des délais (citons le cas des fouilles de sauvetage, très limitées en temps et en budget, destinées en général à couvrir de grandes surfaces). Cependant, dans tous les cas, l’objectif primordial sera de mettre en évidence, d’étudier et d’analyser les relations stratigraphiques qui lient les différentes unités entre-elles.
Trois principes typologiques• Principe 1 : l’Unité Stratigraphique US Il s’agit de la plus petite division de la séquence stratigraphique locale, c’est à dire tout résultat cohérent d’une action anthropique ou naturelle unique, qu’elle se concrétise ou non sur le terrain par une donnée physique (exemple d’origine d’une US : terre végétale, sol construit, destruction, remblai, occupation, construction). On les classe en trois catégories : – les unités stratigraphiques positives : c’est le cas de la couche classique. – les unités stratigraphiques négatives : il s’agit de surfaces (donc sans volume) qui correspondent à un phénomène d’érosion ou résultat d’action anthropique (cas des interfaces). – les unités stratigraphiques construites : c’est le cas de l’US positive associée à une activité anthropique de construction. • Principe 2 : le Fait Archéologique FAI Un Fait Archéologique est un ensemble structuré volontairement, qui peut être isolé et étudié en tant que tel, et auquel se trouvent rattachées une ou plusieurs US (exemple de FAI : fosse, fossé, poteau, silos, avant-trou, mur…). • Principe 3 : la Structure Archéologique Complexe SAC Une Structure Archéologique Complexe est une série de FAI individuels qui constituent un ensemble cohérent interprétable comme un fait complexe (exemple : un quartier artisanal de potiers).
Les réponses aux principes de LattesNous faisons ici appel au formalisme de Lattes* qui pose les bases d’une étude raisonnée et cohérente de l’enregistrement et de la gestion des données. L’enregistrement tel qu’il est aujourd’hui formalisé s’articule autour de trois principes de base présentés précédemment et qui répondent en fait à trois impératifs : 1. Distinction entre les dépôts et la sédimentation d’une élaboration structurée. 2. Distinction entre les élaborations fondamentales et les structures complexes. 3. Respect de la complexité et de la logique de la dynamique anthropique. *Les systèmes d’enregistrement, de gestion et d’exploitation de la documentation issue des fouilles de Lattes. Lattara, 1991, volume 4. Précisions sur les procédures d’enregistrement au cours de la fouille Les relations stratigrapiques entre les couches doivent être notées au cours de la fouille et représentées par des dessins de coupes (par exemple : “scellé par”, “coupé par”, “sur”…) car elles déterminent les relations de chronologie relative. • Interprétations logiques : les Caractéristiques Archéologiques Fonctionnelles On associe aux strates des Caractéristiques Archéologiques Fonctionnelles (CAF), qui donnent l’interprétation de l’unité stratigraphique étudiée (par exemple : construction, remblai, occupation, réaménagement, destruction, abandon, remblai, évolution naturelle…). • Les interprétations temporelles : le découpage chronologique On effectue un regroupement par phase chronologique à plusieurs échelles : – sous – phase : logique spatiale, stratigraphique et fonctionnelle d’un secteur. – phase : logique spatiale, stratigraphique et fonctionnelle d’une zone. – période : logique spatiale, stratigraphique et fonctionnelle d’un site.
Les matrices de Harris : un procédé d’analyse systématiqueLe procédé d’analyse systématique le plus connu de la stratigraphie est la matrice de Harris, élaborée par E.C. Harris, ( HARRIS (E.C.), Principles of Archaeological Stratigraphy, Londres, 1979). Chaque US est définie par ses limites et son contenu. La stratigraphie peut alors être reconstituée par les relations de postériorité et d’antériorité des couches en contact. Le diagramme réalisé en premier lieu transforme les observations de terrain de type “sur”, “sous” ,”scelle”, “coupe” par “antérieur”, “postérieur”, “synchrone” à l’aide de traits et de cases qui symbolisent les couches et leur recouvrement. Le diagramme peut se faire à différentes échelles : secteur, zone ou site, par intégration des données. C’est ainsi que l’on constitue la périodisation du site. • Précision sur le formalisme utilisé La relation stratigraphique est transitive (A plus récent que B et B plus récent que C entraîne A plus récent que C) ; La relation stratigraphique est antisymétrique (A plus récente que B, B plus récente que A, alors A et B sont contemporaines). Si on montre que des couches scindées sont identiques, on le note par le signe “ = “, pour montrer qu’elles ne sont pas positionnables l’une par rapport à l’autre. |